Déontologie

Principes fondamentaux

Le conservateur-restaurateur diplômé doit se conformer à un code de déontologie (voir code de déontologie établi par ECCO) qui s'appuie sur quatre principes : la réversibilité, la compatibilité, la lisibilité et la stabilité.


La réversibilité

Tous ce qui a été fait sur une œuvre doit pouvoir être défait sans que l'objet n'en soit affecté, ni modifié par rapport à son état initial.

Toutefois, lorsque l'on a affaire à des œuvres très altérées, ce principe ne peut pas être totalement respecté. Un consolidant introduit dans une objet par exemple, bien qu'il reste durablement soluble, ne pourra pas être totalement extrait de l'objet traité.

C'est pour cette raison que:

- tout traitement partiellement irréversible doit être parfaitement justifié et documenté,

- une intervention interprétative, comme la réintégration colorée d'une lacune, doit toujours être parfaitement réversible car dans la plupart des cas, elle n'est pas indispensable à la bonne conservation de l’œuvre, mais ne joue qu'un rôle esthétique,

- quand un traitement laisse au contact de l’œuvre des matériaux irréversibles, il est impératif que les notions de compatibilité et de stabilité de ces matériaux soient respectées.


La compatibilité

Les interventions faites par un restaurateur ne doivent pas nuire à la conservation et à la compréhension de l’œuvre traitée. Pour parvenir à cet objectif, nous nous efforçons d'utiliser des matériaux et des traitements qui sont compatibles avec les matériaux originaux, aussi bien au niveau physique, mécanique, chimique que optique.

Pour combler un manque sur un objet (une écaille de peinture tombée, ou un tesson de poterie disparue), le recours à des matériaux ou des procédés reproduisant les originaux n'est pas en soit une garantie de compatibilité : les matériaux constitutifs de l'objet ont vieilli et leurs propriétés se sont donc transformées. Pour des œuvres contemporaines, l'emploi de matériaux et procédés identiques pourraient paraître satisfaisant car le vieillissement des matériaux originaux serait quasi identique à celui des matériaux de restauration. Le problème dans ce cas n'est pas la notion de compatibilité, mais celle de "lisibilité" de l'intervention.


La lisibilité

Les traitements effectués sur une œuvre quelle qu'elle soit doivent toujours rester lisibles afin de ne pas confondre les matériaux originaux des produits de restauration.

Réintégration colorée illusionniste sous lumière du jour

Réintégration colorée illusionniste sous UV (en bleu: les retouches)

École française, Portrait d'un Conseiller au Parlement, Début XVIIIème siècle, musée du temps, Besançon (voir restauration détaillée ici)


En peinture de chevalet il est parfois impossible pour certains traitements - comme une retouche illusionniste par exemple - de les laisser visibles. C'est notamment pour cette raison que nous utilisons systématiquement des matériaux différents des originaux. Pour effectuer une réintégration colorée illusionniste sur une peinture à l'huile nous n'utilisons jamais de peinture à l'huile, mais plutôt de l'aquarelle ou des pigments liés à une résine synthétique. Évidement, la "lisibilité" de la restauration dans ce cas ne pourra pas se faire à l’œil nu. L'emploi d'une loupe, d'une lumière rasante ou encore d'une lumière ultraviolette (voir photos ci-dessus) sera nécessaire. Cette lisibilité est également rendue possible grâce au rapport de traitement qui explique en détail les interventions et leurs localisations.


La stabilité

Les matériaux introduits sur un objet doivent conserver le plus longtemps possible leurs propriétés sans dégrader l'objet. Tout traitement de restauration ne doit jamais compromettre la stabilité de l’œuvre. Un vernis de restauration ne devra par exemple pas jaunir en vieillissant. Cette stabilité doit également concerner la compatibilité et la stabilité des matériaux utilisés. La peinture employée pour une retouche devra conserver sa solubilité initiale même quarante ans après son application afin de pouvoir être enlevée avec le même solvant que celui utilisé lors de sa mise en œuvre.

Pour restaurer un objet, nous utilisons uniquement des matériaux dont nous connaissons parfaitement les propriétés optiques, chimiques et physiques (notamment grâce à des tests de vieillissement). Cependant, comme la stabilité de ces matériaux est dépendante des conditions de stockage et de présentation de l’œuvre, la documentation précise des interventions et les conseils de conservation doivent être systématiques.


Photos ©Nadège Jacobé, publiées avec l'aimable autorisation du Musée du Temps (Besançon)